Le Droit des OPA en bref

Le droit des OPA en bref

1. Qu'est-ce qu'une offre publique d'acquisition ?

La notion d'offre publique d'acquisition désigne l'offre publique faite aux détenteurs de titres de participation d'une société cotée en bourse (société visée) de vendre leurs titres de participation à l'offrant au prix fixé dans l'offre.

Toutefois, ni la loi ni les ordonnances pertinentes ne contiennent une définition ou description claire du terme "publique". La loi indique simplement qu'une offre d'acquisition est présentée publiquement aux détenteurs d'actions ou d'autres titres de participation (art. 2 lit. i LIMF). C'est le cas en pratique lorsque l'offre est présentée à un grand nombre de personnes ou est publiée de manière à atteindre un grand nombre de personnes (par exemple par le biais d'une publication dans des médias électroniques ou dans la presse). Le nombre des destinataires effectivement atteints n'a pas d'importance.

Les titres de participation comprennent en particulier les actions, les bons de participation et les bons de jouissance. Ceci inclut également les droits de conversion et d'option, ainsi que les instruments qui confèrent de tels droits de conversion et d'option (par exemple les emprunts convertibles).

Un critère déterminant pour qu'une transaction soit qualifiée d'offre d'acquisition réside dans le fait que les destinataires de l'offre en qualité de détenteurs des titres de participation puissent réellement choisir d'accepter l'offre ou de conserver leurs titres. En conséquence, les transactions dans lesquelles les détenteurs de titres de participation sont contraints de transférer leurs titres (par exemple une fusion, après une décision de l'assemblée générale allant dans ce sens) ne constituent pas une offre d'acquisition dans le sens mentionné ci-dessus.

L'offrant est la partie qui présente l'offre publique d'acquisition. L'offrant est soumis à plusieurs obligations pendant la procédure d'offre publique d'acquisition. Il doit en particulier faire vérifier le prospectus d'offre par un organe de contrôle puis le publier, traiter de manière identique tous des destinataires de l'offre (voir la question 8 concernant la Best Price Rule), annoncer quotidiennement à la Commission des OPA les transactions concernant des titres de participation de la société visée et les titres offerts en échange, ainsi que publier le résultat intermédiaire et le résultat final.

Les offres publiques de rachat d'une société cotée portant sur ses propres titres de participation sont également considérées comme des offres publiques d'acquisition. Ces offres publiques de rachat sont toutefois soumises à des règles simplifiées en comparaison avec les offres publiques d'acquisition. Sous certaines conditions, une offre de rachat d'actions doit simplement être annoncée à la Commission des OPA avant son exécution.

2. Où se trouvent les bases légales des offres publiques d'acquisition ?

 

Le droit suisse des OPA se trouve aux articles 125 à 141 de la Loi fédérale sur les infrastructures des marchés financiers et le comportement sur le marché en matière de négociation de valeurs mobilières et de dérivés du 19 juin 2015 (Loi sur l'infrastructure des marchés financiers, "LIMF"), dans l'Ordonnance sur les infrastructures des marchés financiers et le comportement sur le marché en matière de négociation de valeurs mobilières et de dérivés du 25 novembre 2015 (Ordonnance sur l'infrastructure des marchés financiers, "OIMF"),dans une ordonnance de l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (Ordonnance de la FINMA sur l'infrastructure des marchés financiers, "OIMF-FINMA"), respectivement de la Commission des OPA (Ordonnance sur les OPA, "OOPA"), ainsi que dans quatre circulaires de la Commission des OPA.

 

Toutes les bases juridiques, y compris les versions antérieures, peuvent être téléchargées ici.

3. Quel est le but de la règlementation légale des offres publiques d'acquisition ?

Le cadre légal a pour but premier de garantir l'intégrité et la transparence des offres publiques d'acquisition ainsi que l'égalité de traitement des détenteurs de titres de participation. L'objectif est de donner un cadre au marché suisse du contrôle des entreprises, soit aux acquisitions d'entreprises cotées en Suisse, et d'assurer, dans l'intérêt des détenteurs de participation, la loyauté et la transparence des conditions d'acquisition ainsi qu'une procédure équitable.

4. A quelles sociétés cibles le droit suisse des OPA s'applique-t-il ?

Les règles en matière d'OPA de la Loi sur l'infrastructure des marchés financiers et de ses dispositions d'application s'appliquent à toutes les offres publiques d'acquisition portant sur des titres de participation de sociétés ayant leur siège en Suisse et dont au moins une partie des titres sont cotés en Suisse ou de sociétés ayant leur siège à l'étranger et dont au moins une partie des titres de participation sont cotés à titre principal en Suisse.

5. Quelles autres parties peuvent être impliquées dans une offre publique d'acquisition ?

En plus de l'offrant (ou le cas échéant un offrant concurrent), de la société visée et de la Commission des OPA (voir question 15), d'autres personnes et sociétés qui agissent de concert avec l'offrant ainsi que des actionnaires qualifiés de la société visée peuvent être impliqués dans une procédure d'offre publique d'acquisition, respectivement y participer.

Les actes des personnes agissant de concert avec l'offrant peuvent déclencher une obligation de présenter une offre publique d'acquisition. Les personnes physiques ou morales qui agissent de concert avec l'offrant ont diverses obligations : elles doivent en particulier annoncer quotidiennement à la Commission des OPA leurs transactions portant sur des titres de participation de la société visée ainsi que sur les titres offerts en échange. Ces transactions sont pertinentes pour la mise en œuvre de la Best Price Rule. Une obligation pour les personnes agissant de concert avec l'offrant de payer le prix de l'offre n'existe que si l'offre publique d'acquisition le prévoit.

Les actionnaires qualifiés ont un statut particulier dans la procédure devant la Commission des OPA. On entend par actionnaire qualifié tout actionnaire ayant une participation d'au minimum 3 % des droits de vote. A la différence d'un actionnaire ordinaire, un actionnaire qualifié peut obtenir la qualité de partie, déposer des requêtes, former opposition et faire recours.

6. Quels types d'offres publiques d'acquisition existe-t-il ?

Le droit suisse des OPA connaît principalement deux formes d'offres publiques d'acquisition qui sont soumises en partie aux mêmes règles et en partie à des règles différentes : les offres obligatoires (voir questions 7 et 8) et les offres volontaires (voir question 10). Le critère de distinction déterminant est celui de savoir si l'offrant a l'obligation légale  de présenter une offre publique d'acquisition ou s'il agit de manière volontaire.

Une offre publique d'acquisition peut en outre être classée en différentes catégories selon ses spécificités :

  • Offre partielle / totale : Cette désignation indique le nombre de titres de participation que l'offrant propose d'acquérir dans le cadre de l'offre publique d'acquisition. Dans le cas d'une offre totale, l'offrant est disposé à acquérir la totalité des titres de participation en mains du public. En revanche, en cas d'offre partielle, l'offrant ne souhaite acquérir qu'une partie des titres de participation en mains du public. Une offre partielle n'est autorisée que s'il s'agit d'une offre volontaire et si l'acquisition des titres de participation par le biais de cette offre partielle ne déclenche pas l'obligation de présenter une offre.
  • Offre en espèces / d'échange : La distinction réside ici dans le mode de règlement du prix offert. Dans une offre en espèces, le prix offert est réglé exclusivement en espèces. Dans une offre d'échange, l'acquisition des titres de participation se fait en échange de titres de participation de la société offrante ou d'une autre société ou d'autres valeurs mobilières. Une offre mixte est également possible. Dans ce cas, une partie du règlement intervient en espèces et l'autre partie sous forme de valeurs mobilières. Dans le cas d'une offre obligatoire prenant la forme d'une offre d'échange, une alternative en espèces est impérative. Dans le cas d'une offre volontaire, une alternative en espèces n'est généralement pas requise.
  • Offre initiale / concurrente : Cette distinction concerne l'ordre chronologique de plusieurs offres publiques d'acquisition portant sur les titres de participation de la même société visée. L'offre initiale est celle qui a été lancée en premier. Elle est aussi appelée l'offre précédente. L'offre concurrente en revanche est dirigée contre une offre publique existante et vise à empêcher son succès. Afin d'assurer la liberté de choix du destinataire de l'offre en cas d'offre concurrente, les périodes respectives des offres sont coordonnées par la Commission des OPA.
  • Offre amicale / hostile : Cette classification est faite en fonction de la perception de l'offre par la société visée, en particulier par son conseil d'administration. Dans une offre publique d'acquisition amicale, le conseil de la société visée recommande aux destinataires de l'offre l'acceptation de l'offre publique d'acquisition. Le contact entre l'offrant et la société visée préalable à l'offre publique d'acquisition est également un élément typique d'une offre amicale. L'offrant et la société visée signent généralement un accord dit de transaction. Dans ce document, l'offrant prend un engagement concernant les éléments clés de l'offre publique d'acquisition (comme le prix de l'offre, les conditions, etc.) et la société visée assure son soutien à l'offrant. En revanche, dans le cas d'une offre hostile, la société visée se défend contre l'offrant et tente d'empêcher l'acquisition. Ici, le conseil d'administration de la société visée recommandera généralement aux destinataires de l'offre de rejeter celle-ci.
7. Quand parle-t-on d'offre obligatoire ?

Quiconque acquiert, directement, indirectement ou de concert avec des tiers, des titres qui, ajoutés à ceux qu’il détient, lui permettent de dépasser le seuil de 33 1/3 % des droits de vote d'une société visée (calculés par rapport au nombre total des droits de vote ressortant de l'inscription au registre du commerce), est en principe obligé de présenter une offre portant sur tous les titres cotés de cette société.

Sont en particulier visées toutes les transactions d'acquisition directe de titres de participation par l'offrant. Un offrant est toutefois également tenu de présenter une offre quand il acquiert indirectement les titres, soit par un fiduciaire, soit par une société qu'il contrôle ou par tout autre procédé qui lui confère au final le droit de vote sur les titres de participation de la société visée.

Enfin, l'obligation de présenter une offre vaut également pour les personnes qui agissent de concert avec des tiers ou en tant que groupe organisé pour contrôler la société visée (par exemple par des conventions de vote) et dépassent le seuil de 33 1/3 % des droits de vote.

8. Quelles exigences une offre obligatoire doit-elle satisfaire ?

Sur le plan matériel, les offres obligatoires doivent satisfaire aux exigences suivantes :

  • Offre totale : Les offres obligatoires doivent porter sur toutes les catégories de titres de participation cotés d'une société visée, c'est-à-dire sur toutes les actions, les bons de participation et les bons de jouissance cotés de la société visée.
  • Prix minimum : Les offres obligatoires doivent intervenir à un prix minimum, de manière à ce que l'obligation de présenter une offre ne puisse être vidée de son sens en soumettant une offre trop basse. Le prix offert doit dès lors être au moins égal au plus élevé des montants suivants : a) le cours de bourse (soit le cours moyen des transactions en bourse des 60 jours de bourse précédant la publication de l'offre ou de l'annonce préalable, calculé en fonction de la pondération de volumes) ou b) le prix le plus élevé payé par l'offrant pour des titres de participation de la société visée sur les douze derniers mois. La possibilité de l'offrant de payer, hors de l'offre d'acquisition, un prix plus élevé aux actionnaires détenant une participation importante (prime dite de contrôle) a été supprimée lors de la révision législative entrée en vigueur le 1er mai 2013.
  • Best Price Rule : La Best Price Rule oblige l'offrant à offrir le même prix à tous les actionnaires d'une société visée dès la publication de l’offre. Dès ce moment et pendant les six mois suivant l’échéance du délai supplémentaire de l'offre (voir sous chiffre 10 ci-dessous), si un offrant ou des personnes agissant de concert avec celui acquiert des actions de la société visée à un prix supérieur à celui de l’offre, ce prix doit être offert à tous les destinataires de l’offre.
  • Conditions : Les offres obligatoires ne peuvent en principe pas être soumises à des conditions. Uniquement en présence de justes motifs, une offre obligatoire peut exceptionnellement être soumise à une condition, par exemple si l'autorisation d'une autorité est requise pour la prise du contrôle.
  • Règlement : Une pure offre d'échange (paiement sous la forme d'autres titres de participation en lieu et place d'un versement en espèces) est exclue en matière d'offres obligatoires. Si l'offrant propose des valeurs mobilières en échange, il est tenu d'offrir également aux destinataires de l'offre un versement en espèces (alternative en espèces).
9. L'obligation de présenter une offre peut-elle être exclue ?

Par l'introduction d'une clause dite d'Opting Out dans les statuts, une société cotée peut exclure toute obligation d'un acquéreur d'une participation de présenter une offre, même s'il dépasse le seuil de 33 1/3 % des droits de vote. En outre, au moyen d'une clause statutaire d'Opting Up, le seuil imposant une offre obligatoire peut être relevé de 33 1/3 % jusqu'à 49 % des droits de vote.

L'introduction d'une clause d'Opting Out/Opting Up dans les statuts est possible en tout temps. Cette introduction n'est valable selon le droit des offres publiques d'acquisition qu'à la double condition que les actionnaires aient été préalablement informés en toute transparence de cette introduction et des conséquences de l'Opting Out/Opting Up et que la majorité des actionnaires minoritaires l'aient approuvé.

Un Opting Out/Opting Up peut être général ou sélectif. Un Opting Out/Opting Up général libère tout actionnaire, même encore inconnu au moment de l'introduction de la clause statutaire, de l'obligation de présenter une offre et ce, quel que soit le type de transaction. Un Opting Out/Opting Up sélectif en revanche ne libère de l'obligation de présenter une offre que les parties et/ou les transactions déterminées, explicitement nommées ou implicitement visées par la disposition statutaire.

10. Qu'est-ce qu'une offre volontaire et quelles règles doit-elle respecter ?

Des offres qui ne sont pas qualifiées d'offres obligatoires sont considérées comme des offres volontaires et ne sont en principe pas soumises aux restrictions applicables aux offres obligatoires. Une offre volontaire peut par exemple prendre la forme d'une offre dite partielle, c'est-à-dire limitée à un nombre déterminé de titres de participation de la société visée. Elle peut être soumise à des conditions et le montant du prix offert peut être fixé librement sous réserve de quelques exceptions (Best Price Rule et rapport entre les prix offerts pour différentes catégories de titres de participation). Il est également possible de concevoir une offre volontaire comme une pure offre d'échange, soit d'offrir uniquement d'autres titres de participation en contrepartie.

Toutefois, si l'offre volontaire vise des titres de participation dont l’acquisition permettrait à l’offrant de franchir le seuil de 33 1/3%, certaines règles applicables en principe uniquement aux offres obligatoires devront également être respectées. Une telle offre doit en particulier s'étendre à tous les titres de participation cotés de la société visée et doit être conforme aux règles sur le prix minimum. Même si une telle offre peut en principe être soumise à des conditions, l'offrant doit, sitôt qu'il a dépassé le seuil imposant une offre obligatoire en acquérant des titres de participation de la société visée pendant la période d'offre mais en dehors de cette dernière, renoncer à toutes les conditions de l'offre volontaire qui ne sont pas autorisées dans le cadre d'une offre obligatoire.

11. Quel est le déroulement typique d'une offre publique d'acquisition ?

Le graphique ci-dessous illustre le déroulement d'une offre publique d'acquisition ainsi que les délais prévus par la loi en cas d'offre publique d'acquisition amicale. Le déroulement de la procédure peut considérablement différer en cas d'offre publique d'acquisition hostile ou en cas d'offre concurrente.

Il est fréquent que des contacts interviennent déjà entre l'offrant et la société visée concernant l'offre publique d'acquisition, ainsi qu'entre l'offrant et la Commission des OPA, avant que le public n'en soit informé. La Commission des OPA examine toutes les offres publiques d'acquisition et dirige activement l'ensemble de la procédure d'offre publique d'acquisition. Elle est le destinataire de toutes les informations et documents devant être publiés pendant la procédure d'offre publique d'acquisition.

En règle générale, la publication de l'annonce préalable est le premier acte de l'offrant dévoilé au public. Cette publication, qui n'est pas prescrite par la loi, a toutefois plusieurs effets juridiques. L'annonce préalable détermine en particulier la date pertinente pour le calcul du prix minimum. L'offrant doit ensuite publier l'annonce dans les journaux puis le prospectus d'offre. Le prospectus d'offre doit contenir toutes les informations nécessaires permettant aux destinataires de l'offre (les propriétaires des titres de participation de la société visée) de se faire un avis objectif concernant l'offre publique d'acquisition. Il contient en règle générale des informations concernant les personnes impliquées, le financement de l'offre publique d'acquisition, les conditions, les projets de l'offrant concernant la société visée après l'exécution de l'offre publique d'acquisition ainsi qu'un calendrier du déroulement de la procédure d'offre publique d'acquisition. L'organe de contrôle vérifie que le prospectus d'offre soit complet et exact.

Le conseil d'administration de la société visée doit également publier sa prise de position concernant l'offre publique d'acquisition. Cette publication intervient soit dans le prospectus d'offre de l'offrant (en cas d'offre amicale) soit de manière séparée pendant le délai d'offre (en cas d'offre hostile).

La publication du prospectus d'offre est généralement suivie d'un délai de carence de 10 jours de bourse. Ce délai permet de vérifier que le prospectus d'offre satisfait aux exigences légales. A l'expiration du délai de carence commence le délai d'offre, pendant lequel l'offre publique d'acquisition peut être acceptée par les destinataires de l'offre et les titres de participations apportés à l'offrant. Ceci intervient en règle générale par communication à la banque du destinataire de l'offre. Le délai d'offre dure généralement 20 jours de bourse, mais peut être prolongé à 40 jours de bourse. L'offrant doit ensuite publier le résultat intermédiaire et en particulier déclarer si l'offre publique d'acquisition a abouti ou non. Si tel n'est pas le cas, l'offrant peut retirer son offre publique d'acquisition et la procédure sera interrompue. Si au contraire l'offre a abouti, ou si l'offrant souhaite néanmoins exécuter l'offre publique d'acquisition, un délai supplémentaire suivra la publication du résultat intermédiaire. Pendant ce délai de 10 jours de bourse, les destinataires de l'offre ont encore la possibilité d'accepter l'offre et d'apporter leurs titres. Après l'expiration du délai supplémentaire, l'offrant doit publier le résultat final et procéder à l'échange (titres de participation contre prix offert). Lors de l'exécution, les titres de participation de la société visée sont transférés à l'offrant et les destinataires de l'offre qui l'ont acceptée reçoivent le prix offert sur leur compte bancaire ou dans leur dépôt bancaire.

Si l'offrant ne devient pas l'uniqueactionnaire de la société visée après l'exécution de l'offre, il peut, sous certaines conditions, faire annuler les titres de participation restants de la société visée (Squeeze-out selon le droit boursier) ou envisager une fusion avec dédommagement (Squeeze-out Merger) (voir question 16).

12. A quoi sert une Fairness Opinion ?

Dans le cadre d'une procédure d'offre publique d'acquisition, le conseil d'administration de la société visée fait souvent établir une Fairness Opinion par une banque d'investissement ou un conseiller financier. Une Fairness Opinion a pour but d'établir, selon différentes méthodes d'évaluation (en particulier méthode des flux de trésorerie actualisés et des multiples de transaction), une fourchette de valeurs pour les titres de participation de la société visée. L'objectif n'est donc pas de calculer une valeur exacte. Néanmoins, la Fairness Opinion permet d'apprécier l'adéquation du prix de l'offre. La Fairness Opinion aide ainsi les destinataires de l'offre dans le processus de prise de décision concernant l'acceptation ou le rejet de l'offre. La Fairness Opinion est publiée en même temps que le rapport du conseil d'administration.

Il n'y a d'obligation de produire une Fairness Opinion que dans des cas exceptionnels. Une obligation de réaliser une Fairness Opinion existe en l'absence d'au moins deux membres du conseil d'administration de la société visée exempts de conflits d'intérêts. La plupart du temps, ce n'est pas uniquement pour satisfaire à cette obligation que le conseil d'administration fait établir une Fairness Opinion, mais c'est aussi pour s'en servir afin de légitimer sa propre position - soit le rejet de l'offre, soit la recommandation d'accepter l'offre ou l'absence de toute recommandation.

13. Intentions d'acquisition déclarées publiquement: que signifie put up or shut up?

La règle dite put up or shut up rule peut s'appliquer lorsqu'une personne envisage publiquement la possibilité de lancer une offre publique d'acquisition (offre potentielle) sans formellement publier une offre. Étant donné que ces déclarations d'intentions se traduisent régulièrement par une incertitude sur le marché, la Commission des OPA peut obliger cette personne (offrant potentiel) à procéder dans un délai déterminé, soit à la publication d'une offre pour les titres de la société visée (put up), soit à une déclaration publique en vertu de laquelle il renonce à lancer une offre dans un délai de six mois ou à franchir le seuil de déclenchement de l'offre obligatoire (voir question 7) (shut up). La Commission des OPA jouit d'un large pouvoir d'appréciation dans l'application de cette règle.

14. Quelles mesures de défense la société visée a-t-elle à disposition contre une tentative indésirable de reprise?

Une société potentiellement visée peut prendre différentes mesures pour limiter l'influence d'un actionnaire indésirable ou pour repousser une tentative de reprise indésirable.

Ces mesures de défense peuvent être divisées en deux grandes catégories :

  • Mesures de défense avant la publication de l’offre d’acquisition : de telles mesures de défense, également dites préventives, ont généralement pour but de prévenir que des personnes potentiellement intéressées ne tentent une reprise. A côté de mesures défensives purement factuelles ou contractuelles, il est ici question avant tout de mesures de défense statutaires, comme des dispositions restreignant la transmissibilité, des limites quant aux droits de vote, ou des exigences de présence et de majorité qualifiées. Ces mesures ont pour but de limiter l’influence d’actionnaires spécifiques sur la formation de la volonté au sein de la société visée. Sous l’angle du droit des OPA, de telles mesures de défense sont en principe licites dans la mesure où elles peuvent être levées.
  • Mesures de défense après la publication de l’offre d’acquisition ou l’annonce préalable : ces mesures de défense, à défaut d'approbation par l'assemblée générale, ne sont licites que dans une mesure limitée. Le conseil d’administration ne peut prendre de décisions sur des actes juridiques qui auraient pour effet de modifier de façon significative l’actif ou le passif de la société, dont notamment :
    • vente ou achat de valeurs patrimoniales pour plus de 10 % du total du bilan ou qui contribuent pour plus de 10 % à la rentabilité (scorched earth defense);
    • vente ou engagement de l’objet principal de l’offre tel qu'indiqué par l’offrant (crown jewel defense);
    • compensations de départ inusuellement élevées (golden parachutes);
    • émission de nouvelles actions sur la base de capital autorisé ou conditionnel;
    • achat ou vente de propres titres de participation;
    • émission ou constitution de droits relatifs à l’acquisition de ses propres titres de participation.

Le conseil d’administration de la société visée a toutefois à disposition, après la publication d'une offre d'acquisition, y compris en cas de lancement d'une offre hostile, divers moyens pour se défendre d'une offre malvenue, comme par exemple la proposition de mesures de défense statutaires, l'annonce d'un plan de rachat d'actions, la recherche d'un repreneur amical (White Knight), entraîner l'offrant dans des démêlés judiciaires ou avoir recours à des actions de relation publique. Le conseil d'administration de la société visée doit toutefois préalablement notifier à la Commission des OPA toute mesure de défense qu'il envisage de prendre.

Les mesures de défense du conseil d’administration ou de l’assemblée générale qui violent manifestement le droit des sociétés sont dans les tous les cas illicites sous l’angle du droit des OPA. Sont également visées en particulier les mesures prises avant la publication de l’offre ou de l’annonce préalable.

 

15. A quelle surveillance les offres publiques d’acquisition sont-elles soumises?

Les offres publiques d’acquisition sont soumises à la surveillance de la Commission des OPA (COPA) et de l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA).

La COPA veille au respect des dispositions applicables aux offres publiques d’acquisition. Elle est généralement contactée par l'offrant et d'autres parties avant même la publication de l'offre publique d'acquisition ou de l'annonce préalable et suit ensuite la procédure d'acquisition de manière active. Elle se prononce par le biais de décisions et les publie sur son site internet, www.takeover.ch.

La FINMA est l'autorité de surveillance indépendante dans le domaine du droit des OPA et fonctionne en particulier comme autorité de recours contre les décisions de la Commission des OPA. Les décisions de la FINMA peuvent à leur tour faire l'objet d'un recours devant le Tribunal administratif fédéral. Les procédures en matière d'acquisition se distinguent par des délais extrêmement brefs et en règle générale des durées très courtes.

16. L'offrant peut-il à la suite d'une offre publique d'acquisition exclure les actionnaires minoritaires restants?

A la suite de l'exécution de l'offre publique d'acquisition, l'offrant ne détient généralement pas tous les titres de participation de la société visée : certains détenteurs de titres de participation ne souhaitent pas apporter leurs titres à l'offrant et d'autres n'ont peut-être pas même pris connaissance de l'offre publique d'acquisition. L'offrant a toutefois un grand intérêt à acquérir la totalité des titres de participation et à devenir ainsi l'actionnaire unique de la société visée. Afin d'atteindre ce but, l'offrant a, au terme de l'offre publique d'acquisition, les possibilités suivantes :

  • L'offrant détient plus de 98% des droits de vote de la société visée : la LIMF prévoit dans ce cas que l'offrant peut, pendant un bref délai après l'expiration de l'offre, faire annuler les titres de participation restants de la société visée (pas uniquement les actions) dans le cadre d'une procédure judiciaire, avec pour conséquence l'exclusion des actionnaires minoritaires de la société visée (Squeeze-out selon le droit boursier). Si la requête de l'offrant est approuvée, tous les titres de participation restants, émis à nouveau suite à leur annulation, seront remis à l'offrant, contre paiement du montant de l'offre en faveur des propriétaires exclus. L'offrant deviendra ainsi l'actionnaire unique de la société visée;
  • L'offrant détient entre 90% et 98% des droits de vote de la société visée : dès lors que l'offrant contrôle la société visée, il peut la fusionner avec une autre société qu'il contrôle. Dans le cadre d'une telle fusion, il est possible d'exclure les actionnaires minoritaires de la société fusionnée en prévoyant que seul un dédommagement leur sera versé (Squeeze-out Merger);
  • L'offrant détient moins de 90% des droits de vote de la société visée : l'offrant ne dispose d'aucun moyen lui permettant d'exclure directement les actionnaires minoritaires de la société visée. L'offrant peut toutefois, également après l'exécution de l'offre publique d'acquisition, acquérir des titres de participation de la société, afin d'atteindre les seuils de 90% ou 98% des droits de vote. S'il y parvient et si les autres conditions sont remplies, il peut alors procéder selon les possibilités décrites ci-dessus.

Indépendamment de ces possibilités, une décotation des titres de participation de la société visée est également envisageable. Cette décision relevant de la compétence du conseil d'administration, l'offrant n'a besoin pour ce faire que de prendre le contrôle du conseil d'administration de la société visée. Même si la décotation n'a pas d'influence directe sur le statut juridique des actionnaires minoritaires, ceux-ci perdent néanmoins la faculté de vendre leur participation en plaçant simplement un ordre à la bourse.